Manuel pour les étudiants de la ІІІe année Dossier 1.

GALYNA DRANENKO

Littérature française du XIX° siècle. Lecture analytique

DOSSIER 1.  Prosper Mérimée (1803-1870)

Introduction
Prosper Mérimée est né à Paris le 28 septembre 1803, et est issu d'une famille assez aisée et cultivée. Le grand-père paternel, François, était à la fois avocat au parlement de Rouen et intendant du maréchal de Broglie. Les parents de l'écrivain appartiennent au milieu artistique.
Son père, Jean-François Léonor Mérimée est professeur de dessin à l'école polytechnique. C'est un fonctionnaire modèle, un homme doux et calme, un peu austère, amateur intelligent et peintre banal. Il est secrétaire adjoint et ensuite secrétaire perpétuel de l'école des Beaux Arts. Mérimée a beaucoup souffert de l'éloignement de son père.
La mère de Prosper, Anne Louise Moreau, voltairienne et bourgeoise, lui reste intelligemment dévouée jusqu'à sa mort, puisque peu d'enfants ont été plus choyés, plus dorlotés que le fragile Prosper. C'est sa mère qui lui a transmis le goût des arts et le don de conter. Mérimée est un enfant de bourgeois, un enfant gâté. Il est égoïste et orgueilleux. Il est enfant unique, ce qui renforce sa solitude. Il est fier et exigeant envers tout le monde. Il a une âme sensible mais citadine car il passe son enfance à Paris. Il possède beaucoup de bon sens, il est intelligent et curieux mais il est effronté et pessimiste, plus il grandit plus il se dévergonde, mais il reste malgré tout très timide.
Enfant, Mérimée voulait faire du dessin, mais son père l'en dissuada pour l'orienter vers des études de droit. Néanmoins, il garde cette passion et dessine pour le plaisir. Il entre donc en 1811 dans la section langues anciennes au lycée Napoléon, où son père enseigne le dessin. Il est externe, car sa famille habite près de l'école. Sa mère suit ses études de près tant que son niveau le lui permet, ce qui vaut à Mérimée de recevoir un second prix de thème et un accessit de version. Sa mère est très fière de lui. Il se distingue ainsi jusqu'à la quatrième, puis, sa mère ne pouvant plus l'aider, ses résultats baissent car Mérimée n'est pas appliqué dans son travail. Cependant il a du goût pour les langues : c'est un bon latiniste, un très bon helléniste et un philologue hors pair, il étudie aussi l'italien.
En 1819, poussé par son père, il s'inscrit à la faculté de droit. Il prépare sa licence et pour chaque épreuve reçoit trois ou quatre "boules rouges", ce qui lui fait une honorable moyenne. En même temps qu'il va à la faculté, il suit quelques cours au collège de France, et étudie notamment la linguistique, l'épigraphie et la numismatique. Avec sa licence, il devient avocat au cabinet du conte d'Argout, puis il est reçu au ministère du Commerce. Mérimée n'a donc jamais eu la vocation d'écrire bien qu'il en ait le besoin.
Par la suite il fait des voyages d'études en France et dans les pays étrangers pour son travail d'Inspecteur des monuments historiques. Puis Mérimée étudie le russe, ce qui lui permet d'introduire en France la littérature russe, notamment celle de Pouchkine, Tourgeniev et Gogol. Mérimée est aussi un disciple d'Helvetius, dont la philosophie matérialiste, sensualiste et athée, ressort dans certaines de ses œuvres.
En 1822 il écrit sa première tragédie, Cromwell. Cette œuvre a du succès pour trois raisons : la précocité de l'auteur, l'originalité du sujet et la façon de l'écrire. Ce texte met en scène des marionnettes dialoguant entre elles et avec le public sur la vie en Angleterre au XVII siècle.
Ensuite il écrit des mystifications littéraires. Il publie tout d'abord des pièces qu'il attribue à une femme de lettres espagnole imaginaire, Clara Gazul. Ces pièces, Le Théâtre de Clara Gazul publiée en 1825 puis La Guzla publiée en 1827, se sont peu vendues mais ont un succès retentissant. Ce succès permet à Mérimée de fréquenter le salon de Mme Récamier où se réunissent les opposants de Bonaparte et la brillante société. La Guzla regroupe vingt huit ballades illyriques. Le théâtre de Clara Gazul est un ensemble de courtes pièces. Les mystifications, quatre œuvres, qui lui permettent de passer outre la censure, lui sont inspirées par son ami Stendhal, qu'il rencontre au retour d'un voyage en Italie en 1822. Ces premières œuvres sont donc des courtes pièces, des ballades, intelligentes et insolentes, parfois humoristiques, parfois dramatiques. Elles ont tant de succès qu'elles sont traduites en allemand et quelques-unes en russe.
En 1840, Mérimée publie une relation de son voyage en Corse, où il a noté et traduit certains chants corses, qui d'après lui sont typiques du pays et de ses habitants. C'est la période d'une production littéraire intense. Tout d'abord la Chronique du temps de Charles IX (roman historique) puis une série de nouvelles (Mateo Falcone, Vision de Charles IX, Tamango, Federigo, L'Enlévement de la Redoute) qui lui permettent d'asseoir sa réputation. Ce sera ensuite La Vénus d'Ille (1837), Colomba (1840) et Carmen (1845) – 3 récits où Mérimée qui fait preuve à la fois de concision et de pittoresque, donne à la Nouvelle ses lettres de Noblesse.
Prosper Mérimée est pessimiste, il croit que les hommes sont mauvais. « Ce plaisantin jouisseur, qui ne faisait pas grand cas de la littérature, a tout de même trouvé le temps d'écrire quelques chefs-d'oeuvres » dit Philippe D'Ormesson en parlant de Mérimée. Par le choix de ses sujets, qui sont souvent modernes, par un mélange constant du tragique et du comique, par le goût du fantastique, et par son amour des terres du Sud, Mérimée appartient à son temps et au romantisme. Il aime la passion, les ruptures, tout ce qui s'insurge et bouillonne. L'émotion, chez lui, est toujours tenue en lisière par l'ironie, la brièveté et le savoir. Prosper Mérimée écrit comme on parle, voire comme on écrit une lettre (il décrit très peu et l'anecdote emporte tout). Ce sont de ces détails rapides et bien choisis d'où jaillit ce qui est son fort et son but : LA VIE.
Le style de Mérimée est à l'image d'un vêtement élégant sur un homme qui sait vivre, et pour bien montrer que la littérature est un jeu dans un autre jeu qui est la vie, il ne termine pas ses nouvelles. Il aime ces formules simples qui renvoient à autre chose qui n'a pas besoin d'être dit. La marque de Mérimée est ce freinage permanent de la passion et de l'émotion.
« Carmen »
Cette nouvelle de Prosper Mérimée est publiée le 1er octobre 1845 à Paris dans la Revue des deux mondes. Lorsqu'il publie Carmen, Mérimée s'est déjà rendu deux fois en Espagne. Tout d'abord en 1830, c'est lors de ce voyage qu'il fait la connaissance d'Eugénie de Montijola, la future épouse de l'empereur Napoléon III. Il s'y rend une seconde fois en 1840. Il ne visite alors que Madrid et le nord de l'Espagne. Sa recherche bibliographique et ses souvenirs de voyage nourriront ce court récit qui symbolise la passion destructrice.
Résumé de « Carmen »
Au cours d'un voyage en Espagne, le narrateur, archéologue, rencontre, au bord d'une source, un brigand, José Navarro. Il protège sa fuite et lui évite d'être arrêté. La semaine suivante, à Cordoue, le narrateur fait la connaissance de Carmen, une jolie gitane. Cette fois, c'est José Navarro qui le sauve du guet-apens dans lequel Carmen voulait le faire tomber. Quelques mois plus tard, le narrateur rend visite à José, la veille de son exécution. Le bandit lui raconte son histoire : brigadier des dragons, il est devenu déserteur, meurtrier, contrebandier et voleur par amour pour Carmen. Puis délaissé par la belle gitane, il l'a tuée.

Extrait de la nouvelle « CARMEN »
Séquence narrative 1

Un soir, à l'heure où l'on ne voit plus rien, je fumais appuyé sur le parapet du quai, lorsqu'une femme, remontant l'escalier qui conduit à la rivière, vint s'asseoir près de moi. Elle avait dans les cheveux un gros bouquet de jasmin, dont les pétales exhalent le soir une odeur enivrante. Elle était simplement, peut-être pauvrement vêtue, tout en noir, comme la plupart des grisettes dans la soirée. Les femmes comme il faut ne portent le noir que le matin; le soir, elles s'habillent à la francesa. En arrivant auprès de moi, ma baigneuse laissa glisser sur ses épaules la mantille qui lui couvrait la tête, et, à l'obscure clarté qui tombe des étoiles, je vis qu'elle était petite; jeune, bien faite, et qu'elle avait de très grands yeux. Je jetai mon cigare aussitôt. Elle comprit cette attention d'une politesse toute française, et se hâta de me dire qu'elle aimait beaucoup l'odeur du tabac, et que même elle fumait, quand elle trouvait des papelitos bien doux. Par bonheur, j'en avais de tels dans mon étui, et je m'empressai de lui en offrir. Elle daigna en prendre un, et l'alluma à un bout de corde enflammée qu'un enfant nous apporta moyennant un sou. Mêlant nos fumées, nous causâmes si longtemps, la belle baigneuse et moi, que nous nous trouvâmes presque seuls sur le quai. Je crus n'être point indiscret en lui offrant d'aller prendre des glaces à la neveria. Après une hésitation modeste elle accepta; mais avant de se décider, elle désira savoir quelle heure il était. Je fis sonner ma montre, et cette sonnerie parut l'étonner beaucoup.
– Quelles inventions on a chez vous, messieurs les étrangers ! De quel pays êtes-vous, monsieur? Anglais sans doute?
– Français et votre grand serviteur. Et vous, mademoiselle, ou madame, vous êtes probablement de Cordoue?
– Non.
– Vous êtes du moins Andalouse. Il me semble le reconnaître à votre doux parler.
– Si vous remarquez si bien l'accent du monde, vous devez, bien deviner qui je suis.
– Je crois que vous êtes du pays de Jésus, à deux pas du paradis. (J'avais appris cette métaphore, qui désigne l'Andalousie, de mon ami Francisco Sevilla, picador bien connu.)
– Bah ! le paradis... les gens d'ici disent qu'il n'est pas fait pour nous.
– Alors, vous seriez donc Mauresque, ou... Je m'arrêtai, n'osant dire : Juive.
– Allons, allons ! vous voyez bien que je suis bohémienne; voulez-vous que je vous dise la baji? Avez-vous entendu parler de la Carmencita? C'est moi.
J'étais alors un tel mécréant, il y a de cela quinze ans, que je ne reculai pas d'horreur en me voyant à côté d'une sorcière. "Bon ! me dis-je; la semaine passée, j'ai soupé avec un voleur de grand chemin, allons aujourd'hui prendre des glaces avec une servante du diable. En voyage il faut tout voir." J'avais encore un autre motif pour cultiver sa connaissance. Sortant du collège, je l'avouerai à ma honte, j'avais perdu quelque temps à étudier les sciences occultes et même plusieurs fois j'avais tenté de conjurer l'esprit de ténèbres. Guéri depuis longtemps de la passion de semblables recherches, je n'en conservais pas moins un certain attrait de curiosité pour toutes les superstitions, et me faisais une fête d'apprendre jusqu'où s'était élevé l'art de la magie parmi les bohémiens.
Fiche de vocabulaire 1

Mot
2
Explications, exemples d’emploi

3
Synonymes
4
Antonymes
5
En ukrainien
enivrant
1.    Vieilli Qui provoque l'ivresse;
2.   Fig. Qui provoque l'exaltation des sens, des sentiments.
Des parfums enivrants.
capiteux;
excitant, grisant, troublant

п'янкий, чарівний
exhaler [εgzale]
Dégager de soi et répandre au dehors (une chose volatile, odeur, vapeur, gaz). Exhaler des effluves, un arôme, une odeur (agréable, désagréable).
sentir (bon, mauvais); embaumer, empester.
aspirer
видихати, виділяти,  виливати,
пахнути
clarté (f)
Concret Lumière qui rend les objets visibles d'une façon nette et distin. « Cette obscure clarté qui tombe des étoiles » (P. Corneille)
lueur

obscurité
світло, ясність, прозорість
obscur
1.Qui est privé (momentanément ou habituellement) de lumière. « Nuit sans étoiles, nuit obscure! » (Baudelaire).
2.Qui est foncé, peu lumineux.
enténébré, noir, sombre
clair, éblouissant, éclatant, lumineux
темний, затемнений, неясний
politesse (f)
Ensemble des usages, des règles qui régissent le comportement, le langage, considérés comme les meilleurs dans une société. Il aurait pu avoir la politesse de nous remercier.
bienséance, civilité, courtoisie, éducation, savoir-vivre, urbanité, usage

ввічливість, чемність, знак уваги
se hâter
Mod. Aller vite, faire vite; ne pas perdre son temps.
Se hâter de (et inf.). Se hâter de sortir, de terminer un travail.
« Il ne faut point se hâter de juger les caractères » (Alain).
se dépêcher, s'empresser
tarder, temporiser, traîner
квапитися, поспішати
par bonheur
Par chance.
Par bonheur, il était encore là
heureuse-ment

на щастя
étui (m)
Étui de carton, de cuir, d'ivoire; en plastique.Étui à violon. Étui à lunettes, à jumelles. Étui à cigares, à cigarettes. Étui de parapluie.


футляр, чохол
s’empresser de
Se hâter.
Il s'est empressé d'avertir tout le monde.
se dépêcher

постаратися, поспішати
daigner f. qch
1.Consentir à (faire qch.) soit en faveur d'une personne qui n'en paraît pas indigne, soit parce qu'on ne juge pas cette chose indigne de soi.
Elle a daigné venir.
2. Iron. Vouloir bien. Daignerais-tu me passer ce livre?
condescendre (à)

зволити
moyennant
Au moyen de, par le moyen de, à la condition de.
Acquérir une chose moyennant un prix convenu. Il accepta de rendre ce service moyennant récompense.
au prix de,
contre, en échange de

за
croire + l'inf.
Sentir, éprouver comme vrai (ce qui ne l'est pas absolument). « nous croyons être acteurs, nous ne sommes jamais que spectateurs » (Maurois).
On croit rêver.
estimer, juger, penser

гадати, вважати, думати
offrir de
Offrir à qqn de l'héberger.
proposer

запросити
hésitation (f)
Arrêt dans l'action; attitude qui trahit de l'indécision, de l'embarras. Avoir une minute, un moment d'hésitation. Marquer une hésitation avant de répondre.

assurance, détermination, résolution
вагання
parler (m)
Ensemble des moyens d'expression employés par un groupe à l'intérieur d'un domaine linguistique. Les parlers régionaux.
dialecte, idiome, langue, patois

говір
mécréant
Qui n'a aucune religion.
impie, incrédule, incroyant

безвірник





Compréhension de la séquence 1.
1. Lisez et traduisez la séquence 1.
2. Point de vue : qui raconte l’histoire ?
3. Repérez les personnages (combien ?) et leurs actions (qui fait quoi ?).
4. Séparez les parties de la séquence : récit (l’histoire des événements) – dialogue (une personne s'adresse à une autre personne qui lui répond) – discours (commentaire des événements).
5. Résumez l’histoire de la séquence 1. en une phrase.
6. Donnez le titre à la séquence 1.
7. Repérez les indicateurs du temps. Par exemple : l. 1[1] un soir ; l.1 à l’heure où l’on ne voit plus rien ; l.4 le soir ; etc.
Comment le temps de la rencontre influence la perception de cette femme par le narrateur ? Quel rapport a cette partie de la journée avec le « métier » de cette femme ?
8. Cherchez les mots qui désignent les lieux. Comment se comportent les personnages par rapport aux lieux où ils se trouvent (mobile/immobile ; haut/bas ; etc.)
9. Cherchez comment est nommée la femme. Par exemple ; l.2 une femme ; l.3,5 elle ; l.8 ma baigneuse ; etc. Comment l’attitude du narrateur envers elle change au fil de la séquence ?
10. Portrait de Carmen – première impression.
Dans quelle progression est peint le portrait physique de cette femme, par quoi est-il commencé (vêtements, silhouette, visage etc.) ?
Quel est le rôle des sens (odorat, vue, etc.) dans la description de Carmen ? 
Faites la liste des caractéristiques de ce personnage. Par exemple :
·      active (l.3 vint s’asseoir près de moi ; l.12 se hâta de me dire … ) ;
·      pauvre (l.5 était simplement, peut-être pauvrement vêtue ; l.6 grisette )...

[1] ligne 1 de la séquence
Séquence narrative 2.

Tout en causant, nous étions entrés dans la neveria, et nous nous étions assis à une petite table éclairée par une bougie enfermée dans un globe de verre. J'eus alors tout le loisir d'examiner ma gitana, pendant que quelques honnêtes gens s'ébahissaient, en prenant leurs glaces, de me voir en si bonne compagnie.
Je doute fort que mademoiselle Carmen fût de race pure, du moins elle était infiniment plus jolie que toutes les femmes de sa nation que j'aie jamais rencontrées. Pour qu'une femme soit belle, disent les Espagnols, il faut qu'elle réunisse trente si, ou, si l'on veut, qu'on puisse la définir au moyen de dix adjectifs applicables chacun à trois parties de sa personne. Par exemple, avoir trois choses noires : les yeux, les paupières et les sourcils; trois fines, les doigts, les lèvres, les cheveux, etc. Voyez Brantôme pour le reste. Ma bohémienne ne pouvait prétendre à tant de perfection. Sa peau, d'ailleurs parfaitement unie, approchait fort de la teinte du cuivre. Ses yeux étaient obliques, mais admirablement fendus; ses lèvres un peu fortes, mais bien dessinées et laissant voir des dents plus blanches que des amandes sans leur peau. Ses cheveux, peut-être un peu gros, étaient noirs, à reflets bleus comme l'aile d'un corbeau, longs et luisants. Pour ne pas vous fatiguer d'une description trop prolixe, je vous dirai en somme qu'à chaque défaut elle réunissait une qualité qui ressortait peut-être plus fortement par le contraste. C'était une beauté étrange et sauvage, une figure qui étonnait d'abord, mais qu'on ne pouvait oublier. Ses yeux surtout avaient une expression à la fois voluptueuse et farouche que je n'ai trouvée depuis à aucun regard humain. Œil de bohémien, œil de loup, c'est un dicton espagnol qui dénote une bonne observation. Si vous n'avez pas le temps d'aller au jardin des Plantes pour étudier le regard d'un loup, considérez votre chat quand il guette un moineau.
On sent qu'il eût été ridicule de se faire tirer la bonne aventure dans un café. Aussi je priai la jolie sorcière de me permettre de l'accompagner à son domicile; elle y consentit sans difficulté, mais elle voulut connaître encore la marche du temps, et me pria de nouveau de faire sonner ma montre.
– Est-elle vraiment d'or? dit-elle en la considérant avec une excessive attention.

Fiche de vocabulaire 2

1
2
3
4
5
loisir (m)
1.Vx État dans lequel il est loisible, permis à qqn de faire ou de ne pas faire qqch
2.Mod. Loc. adv. À LOISIR; TOUT À LOISIR : en prenant tout son temps, à son aise.
3.Temps dont on dispose pour faire commodément qqch. Vous aurez tout le loisir d'y réfléchir après mon départ.
liberté, permission, possibilité

змога

без перешкоди
honnête
Qui se conforme aux bienséances, ou à certaines normes raisonnables
1.Vx HONNÊTE HOMME : homme du monde, agréable et distingué par les manières comme par l'esprit, les connaissances.
2.Vx Qui fait preuve de politesse, de savoir-vivre.
civil, poli

impoli, malséant, mauvais.
пристойний,
порядний



культурний

чемний
ébahir
Frapper d'un grand étonnement. Voilà une nouvelle qui m'ébahit.
Pronom. S'étonner au plus haut point.
stupéfier

приголомшити

остовпіти
la teinte du cuivre
Qui a la couleur rougeâtre.
 Les Indiens d'Amérique ont la peau cuivrée.
roux,
bronzé

побронзовілий колір шкіри
oblique
Qui s'écarte de la verticale, de la perpendiculaire (à une ligne, un plan donnés ou supposés).
Regard oblique, de qqn qui ne regarde pas droit, en face.

biais

косий
криводушний, скритний
fendu

Ouvert en longueur, comme une fente.
Bouche fendue jusqu'aux oreilles. Yeux fendus en amande.





рот по самі вуха,
розріз очей
fort
Considérable par les dimensions.
Mains fortes. Nez fort.
gros, grand,
important
mince,
fin

étrange
Très différent de ce qu'on a l'habitude de voir, d'apprendre; qui étonne, surprend.
bizarre, extraordinaire, singulier, surprenant
 banal, commun, courant, ordinaire
дивний, чудернацький
prolixe
Qui est trop long, qui a tendance а délayer dans ses écrits ou ses discours. Orateur, écrivain prolixe. « Les plus prolixes sont ceux qui ont le moins à dire » ( André Gide).
Abondant, copieux. Discours, style prolixe.
bavard, diffus, verbeux
concis, court, laconique, cursif

sauvage
Qui a qch d'inhumain, marque un retour aux instincts primitifs. « Son air sauvage et brutal. »
barbare, bestial, cruel, féroce

дикий, відлюдний
voluptueux
1.Qui est porté aux plaisirs de l'amour et à leurs raffinements.
2.Qui fait éprouver du plaisir.
3. Qui exprime ou inspire la volupté, les plaisirs amoureux. Attitude, danse voluptueuse.
lascif, sensuel agréable, doux excitant
ascétique, chaste
любострасний
farouche
Qui a qqch. d'absolu et de violent, de peu civilisé (caractère, comportement).
 Un air, un regard farouche.
sauvage
accueillant, doux, familier, sociable
суворий, відлюдний, полохливий
dénoter
Indiquer, désigner par quelque caractéristique. Son attitude dénote un certain courage.
annoncer, marquer, montrer, signifier, supposer

означати
guetter
Observer pour surprendre. Le chat guette la souris.
épier

підстерігати, висліджувати
aventure (f)
1.Vx Ce qui doit arriver à qqn.
2.Mod. BONNE AVENTURE. Dire la bonne aventure à qqn : lui prédire son avenir par la divination. Diseur, diseuse de bonne aventure.
avenir, destin, destinée, sort


ворожити
tirer
Choisir parmi d'autres, dans un jeu de hasard. Tirer une carte, un numéro de loterie. Tirer le bon, le mauvais numéro.
Tirer les cartes : dire la bonne aventure, prédire l'avenir à l'aide des cartes, des tarots. Se faire tirer les cartes.
витягнути

ворожити на картах

Compréhension de la séquence 2.
1. Lisez et traduisez la séquence 2.
2. Pourquoi à la neveria le narrateur a eu « tout le loisir d’examiner » la gitana ?
3. Quelles qualités doit posséder une femme parfaitement belle d’après les Espagnols ?
4. Portrait de Carmen. Remplissez la grille en faisant attention au contraste de son apparence :

partie
couleur
forme
aspect
trait de la
la peau


parfaitement unie
beauté
la teinte du cuivre


disgrâce
les yeux

admirablement fendus

beauté

obliques


disgrâce
les lèvres



beauté





disgrâce
les dents




beauté




disgrâce
les cheveux




beauté




disgrâce
5. Repérez les mots et les expressions caractérisant l’expression de ses yeux.
6. D’après quelles analogies sont faites les comparaisons avec des animaux ?
7. Repérez les mots et les expressions nommant Carmen dans cette séquence. Lesquels  parmi eux prédominent ?
Séquence narrative 3.

Quand nous nous remîmes en marche, il était nuit close; la plupart des boutiques étaient fermées et les rues presque désertes. Nous passâmes le pont du Guadalquivir, et à l'extrémité du faubourg, nous nous arrêtâmes devant une maison qui n'avait nullement l'apparence d'un palais. Un enfant nous ouvrit. La bohémienne lui dit quelques mots dans une langue à moi inconnue, que je sus depuis être la rommani ou chipe calli, l'idiome des gitanos. Aussitôt l'enfant disparut, nous laissant dans une chambre assez vaste, meublée d'une petite table, de deux tabourets et d'un coffre. Je ne dois point oublier une jarre d'eau, un tas d'oranges et une botte d'oignons.
Dès que nous fûmes seuls, la bohémienne tira de son coffre des cartes qui paraissaient avoir beaucoup servi, un aimant, un caméléon desséché, et quelques autres objets nécessaires à son art. Puis elle me dit de faire la croix dans ma main gauche avec une pièce de monnaie, et les cérémonies magiques commencèrent. Il est inutile de vous rapporter ses prédictions, et, quant à sa manière d'opérer, il était évident qu'elle n'était pas sorcière à demi.

Fiche de vocabulaire 3

1
2
3
4
5
clos
À (la) nuit close : quand la nuit est complètement tombée.



глибока ніч
apparence de
Trace, vestige.
Ils n'ont plus aucune apparence de liberté. Une légère apparence.
semblant, soupçon

видимість, натяк
disparaître
S'en aller.
Elle a disparu sans laisser de traces.
fuir, partir, se retirer

зникнути, втікти
rapporter
Venir dire, répéter (ce qu'on a appris, entendu).
« Le récit que je rapporte ici mot pour mot » (A.France).
conter, relater

переповідати

Compréhension de la séquence 3.
1. Lisez et traduisez la séquence 3.
2. Repérez les indicateurs des lieux.
3. Énumérez les objets se trouvant dans la chambre.
4. Pourquoi le narrateur fait-il la conclusion que Carmen était une vraie sorcière ?
5. Pourquoi conduit-elle donc le narrateur chez elle ? Quel est son but ?

Séquence narrative 4.

Malheureusement nous fûmes bientôt dérangés. La porte s'ouvrit tout à coup avec violence, et un homme enveloppé jusqu'aux yeux dans un manteau brun, entra dans la chambre en apostrophant la bohémienne d'une façon peu gracieuse. Je n'entendais pas ce qu'il disait, mais le ton de sa voix indiquait qu'il était de fort mauvaise humeur. A sa vue, la gitane ne montra ni surprise ni colère, mais elle accourut à sa rencontre et, avec une volubilité extraordinaire lui adressa quelques phrases dans la langue mystérieuse dont elle s'était déjà servie devant moi. Le mot payllo, souvent répété, était le seul mot que je comprisse. Je savais que les bohémiens désignent ainsi tout homme étranger à leur race. Supposant qu'il s'agissait de moi, je m'attendais à une explication délicate; déjà j'avais la main sur le pied d'un des tabourets, et je syllogisais à part moi pour deviner le moment précis où il conviendrait de le jeter à la tête de l'intrus. Celui-ci repoussa rudement la bohémienne, et s'avança vers moi; puis reculant d'un pas :
– Ah ! monsieur, dit-il, c'est vous !
Je le regardai à mon tour, et reconnus mon ami don José. En ce moment, je regrettais un peu de ne pas l'avoir laissé pendre.
– Eh ! c'est vous, mon brave, m'écriai-je en riant le moins jaune que je pus; vous avez interrompu mademoiselle au moment où elle m'annonçait des choses bien intéressantes.
– Toujours la même ! Ça finira, dit-il, entre ses dents, attachant sur elle un regard farouche.
Cependant la bohémienne continuait à lui parler dans sa langue. Elle s'animait par degrés. Son œil s'injectait de sang et devenait terrible, ses traits se contractaient, elle frappait du pied. Il me sembla qu'elle le pressait vivement de faire quelque chose à quoi il montrait de l'hésitation. Ce que c'était, je croyais ne le comprendre que trop à la voir passer et repasser rapidement sa petite main sous son menton. J'étais tenté de croire qu'il s'agissait d'une gorge à couper, et j'avais quelques soupçons que cette gorge ne fût la mienne.
A tout ce torrent d'éloquence, don José ne répondit que par deux ou trois mots prononcés d'un ton bref. Alors la bohémienne lui lança un regard de profond mépris; puis s'asseyant à la turque dans un coin de la chambre, elle choisit une orange, la pela et se mit à la manger.
Don José me prit le bras, ouvrit la porte et me conduisit dans la rue. Nous fîmes environ deux cents pas dans le plus profond silence. Puis, étendant la main :
– Toujours tout droit, dit-il, et vous trouverez le pont.
Aussitôt il me tourna le dos et s'éloigna rapidement. Je revins à mon auberge un peu penaud et d'assez mauvaise humeur. Le pire fut qu'en me déshabillant, je m'aperçus que ma montre me manquait.

Fiche de vocabulaire 4

1
2
3
4
5
apostropher
Adresser brusquement la parole à (qqn) de loin et fort, sans politesse.




різко  заговорити з
gracieux
Qui est aimable et souriant.

aimable, avenant, poli
abrupt, impoli
ласкавий, прихильний
à la vue de qn.
 En le voyant « Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue » (Racine)



бачачи когось
montrer
Laisser paraître; révéler par l'attitude, le comportement. Montrer son étonnement, son émotion.
exprimer, extérioriser, manifester, témoigner
cacher, couvrir, dissimuler
виявляти, проявляти
surprise (f)
Cour. État d'une personne surprise, émotion provoquée par qqch. d'inattendu.
étonnement; ébahissement, stupéfaction stupeur

подив, здивування
colère (f)
Violent mécontentement accompagné d'agressivité.
emportement, exaspération, fureur, furie, irritation, rage; fam. rogne.

гнів
volubilité (f)
Abondance, rapidité et facilité de parole.
Elle « parlait sans s'arrêter avec une telle volubilité qu'elle n'avait pas le temps de respirer »
loquacité

балакучість
intrus (m)
Personne qui s'introduit quelque part sans y être invitée, ni désirée. Sa belle-famille la considère comme une intruse.
importun, indésirable

влазень, сторонній, чужий
rudement
De façon brutale.
Frapper, heurter rudement.
brutalement durement


суворо, жорстоко
rire jaune
Rire d'un rire forcé, qui dissimule mal le dépit ou la gêne.
Il souriait un peu jaune.


вимушено сміятися
par degré ou par degrés
Par échelons, par étapes, par paliers.
S'avancer par degrés vers un but.
graduellement, progressivement, successivement

поступово
se contracter
Son visage se contracte.

se durcir
se détendre
перекоситися
s’injecter
 Son œil s'injecte de sang, se colore par l'afflux de sang.


наливатися кров'ю
être tenté
Avoir envie de, tendance à.
Être tenté de croire, de penser...


дуже хочеться
éloquence (f)
Don de la parole, facilité pour bien s'exprimer.
« Il me fallait toute mon éloquence pour la décider. »
abondance, loquacité, verve, volubilité

красномовність
penaud
Honteux à la suite d'une maladresse; interdit à la suite d'une déception.
Demeurer, se sentir penaud, tout penaud.
confus, contrit, déconfit, embarrassé, honteux.

fier
розгублений
спантеличений
засоромлений
збентежений

Compréhension de la séquence 4.
1. Lisez et traduisez la séquence 4.
2. Remplissez la grille en repérant les mots et les expressions marquant les réactions et comportements de trois personnages :


don José
Carmen
narrateur
le mécontentement


l.1 Malheureusement nous fûmes bientôt dérangés.
la colère
l.3 en apostrophant


la peur



la violence



l'indifférence



la défense



l’attente



le regret



la détermination



autre
...



3. Expliquez les raisons de ces comportements.
4. Carmen a-t-elle pu atteindre son but ?
5. Le narrateur regrette-t-il l’aventure acceptée ?

Exercices de lexique

1. Remplacez les mots en italique par des synonymes contextuels :
1. Je crus n'être point indiscret en lui offrant d'aller prendre des glaces à la neveria.
2. Après une hésitation modeste elle accepta.
3. J'eus alors tout le loisir d'exami­ner ma gitana pendant que quelques honnêtes gens s'ébahissaient de me voir en si bonne compagnie.
4. Quand nous nous remîmes en marche, il était nuit close.
5. Nous nous arrêtâmes devant une maison qui n'avait nullement l'apparence d'un palais.
6. Aussitôt l'enfant disparut nous laissant dans une chambre assez vaste, meublée d'une petite table et de deux tabourets.
7. Il est inutile de vous rapporter ses prédictions.
8. Un homme entra dans la chambre en apostrophant la bohémienne d'une façon peu gracieuse.
 9. A sa vue, la gitana ne montra ni surprise, ni colère.
10. Son œil devenait terrible, ses traits se contractaient.
 11. Je revins à mon auberge un peu penaud.

2. Traduisez en français en employant des adjectifs du texte :
П’янкий аромат, темна ніч, порядний чоловік, косий погляд, дивна подорож, любострасний танець, глибока ніч, відлюдне обличчя, прихильна посмішка, спантеличений вигляд.

3. Traduisez les substantifs en français et employez-les avec des adjectifs :
Cвітло, знак уваги, футляр, вагання, говір, натяк, подив, гнів, балакучість, красномовність.

4. Formez des adjectifs :
Volubilité f ; colère f ; observation f ; invention f ; dos m ; explication f ; mépris m; odeur f ; glace f.

5. Dites en d’autres mots :
daigner faire qch ; dire la bonne aventure ; s'empresser de faire qch; il était nuit close; parler avec volubilité; être de mauvaise humeur; être tenté de faire qch ; consentir à faire qch; avoir des yeux bien fendus ; mener une vie orageuse.

6. Mener ou conduire ? Consultez la grille et dites en français :
вести за руку, водити автомобіль, вести справи, керувати автомобілем, проводити засідання, керувати гуртком, проводити заняття, проводити боротьбу, проводити пропаганду, проводити переговори, листуватися, вести протокол, вести записи, проводити розкопки, провадити спокійний (бурхливий) спосіб життя, дорога веде до лісу, до чого це веде, це ні до чого не призведе.

Mener
Conduire
¨     Conduire en accompagnant. « nous allons mener les enfants à l'exposition »
¨     Diriger, commander.
¨     Faire marcher, faire fonctionner. Mener la barque.
¨     Guider vers tel lieu. Ses empreintes nous ont menés jusqu'à lui.
¨     Faire avancer, faire évoluer sous sa direction. Mener deux affaires de front. L'inspecteur mène l'enquête. Mener une négociation.
¨     Mener la vie orageuse: tumultueuse, agitée, mouvementée.
¨     Mener (qqn) quelque part. Conduire qqn chez le médecin. Conduire un enfant à l'école. Conduire qqn en prison. Conduisez-moi jusqu'à lui.
¨     Conduire ses invités jusqu'à la porte.
¨     Diriger. Conduire les pas de qqn.
¨      Conduire la main d'un enfant.
Mener (qn, qch.) quelque part en voiture. Taxi, conduisez-moi à l'Opéra.
¨     Diriger (un animal). Conduire un troupeau, une caravane.
¨     Diriger (un véhicule). Conduire une voiture, un autobus, un tracteur.
¨     Faire aller quelque part. Ce bus vous conduira à la gare. Cette route (vous) conduit à la ville.
¨     Faire agir, mener en étant à la tête. Conduire une armée, une flotte.
¨     Conduire une entreprise, une affaire.
¨     Conduire une intrigue, un complot.
¨     Conduire un orchestre, une danse, en diriger le mouvement.
¨     Amener (qqn) à être dans telle situation. (Sujet personne) Son entraîneur l'a conduit à la victoire. Il l'a conduite au désespoir. Une politique qui nous a conduits à l'échec. Où tout cela nous conduit-il?
¨     Mener, faire progresser (qch.). Conduire un récit, une intrigue, un raisonnement.

7. Cherchez dans la liste les significations du mot « délicat » et remplissez la grille:
Traductions : ніжний, делікатний, тонкий, смачний, ласий, слабий,  тендітний, витончений, вишуканий, складний, сумнівний, сприйнятливий, вразливий, перебірливий, вередливий, примхливий.
Synonymes : fin, raffiné, exigeant, difficile, recherché, élégant, gracieux, joli, mignon, léger, dangereux, périlleux, scabreux, fragile, sensible, difficile, embarrassant, épineux, malaisé, probe, scrupuleux, complexe, compliqué, subtil, délié, pénétrant, sensible, subtil.
Antonymes : grossier, robuste, facile, simple, balourd, épais, indélicat, vulgaire.

Exemples d’emploi
Traductions
Synonymes
Antonymes 
Parfum délicat
тонкий
fin, raffiné
---
Couleur, teinte délicate.



Nourriture, cuisine délicate.



Dentelle délicate.



Le toucher délicat d'un pianiste.



La touche délicate d'un peintre.



Peau délicate.



Être de santé délicate.



Problème délicat, question délicate.



La nuance est si délicate qu'elle risque de vous échapper.



S'engager dans une entreprise délicate.



Une situation délicate.



Lecteur délicat.



Pour un public un peu délicat.



Il est peu délicat en affaires.




8. Employez ces substantifs dans les groupes de mots ou les phrases avec le verbe « glisser » :
Des patins, un parquet ciré, une peau de banane, le pied, la voiture, le fer à repasser, des mains, une couleuvre, le regard, une enveloppe, une allusion, l’oreille, une erreur.

9. Traduisez en ukrainien les expressions avec le mot « heure » :
Faire du cent à l'heure. Mettre sa montre à l'heure. Commencer (bien) avant l'heure. Avancer l'heure du dîner. Femme de ménage payée à l'heure. Fam. Je ne vous demande pas l'heure qu'il est !
Trouvez 10 autres exemples d’emploi du mot « heure ».

10. Traduisez les groupes de mots et les phrases avec le mot « fendre » :
a)   Fendre du bois avec une hache.
b)   Geler à pierre fendre.
c)   Il s'est fendu le crâne en tombant.
d)   Se fendre la pipe (la gueule, la pêche, la poire).
e)   Fendre le cœur, l'âme. Le navire fend les flots.
f)    L'hirondelle fend l'air d'un vol rapide.
g)   Fendre la bise.
h)   Fendre la foule pour se frayer un passage.
i)      Sous l'effet du tremblement de terre, ce gros rocher s'est fendu.
j)      Un vieux mur qui se fend.
k)   Vase qui se fend.
l)      Dans le feu les châtaignes se fendent.
m) Il s'est fendu d'une bouteille.

11. Traduisez en employant les verbes du texte :
1.Не слід поспішати судити людей. 2. Він постарався попередити всіх. 3. Вона зволила прийти. 4.Мені здається, що я сплю. 5.Я запропонував йому зупинитися в мене. 6. Ця новина мене приголомшила. 7.Ця пісня крає мені серце. 8. Його поведінка говорить про певну сміливість. 9. Його підстерігає небезпека. 10. Циганка поворожила йому на картах. 11. Вона втекла, не залишивши слідів. 12. Він переповів мені свою подорож дослівно. 13. Батько різко заговорив з сином. 14. Вона не виявила жодної цікавості з цього приводу. 15. Її обличчя перекосилося. 16. Її очі налилися кров’ю. 17.Мені хочеться вірити, що все це правда. 18. Чи повела б ти мене на цю виставку? 19. Я проведу вас до дверей. 20. Він шепнув мені це на вухо та вимушено всміхнувся.

12. Traduisez d’après le texte et faites entrer dans les phrases :
На щастя; за; без перешкоди; бачачи когось; жорстоко; поступово.

13. Traduisez en français le résumé de l’histoire :
Одного вечора оповідач зустрічає молоду циганку, Карменсіта пропонує цому поворожити. Так як він дуже любить оккультні науки, він погоджується.

14.Traduisez en français :
1. Була темна ніч, кущі жасмину видихали п’нкий аромат, навколо було тихо, в темноті було лише чути хлюпотіння Гвадальківіра та гудіння мошкари.– 2. Незнайома зронила на плечі мантилію, місяць освітив її смугляве обличчя з повними, но гарно окресленими губами.– 3.У циганки був гарнй розріз очей. Її очі зазвичай лукаві і веселі веселі у хвилини гніву наливались кровю і ставали жахні.– 4. То була дивна і дика краса; обличчя, яке вражало відразу і його неможливо було забути.– 5. Сидячи навпроти Кармен, яка задумливо обривала пелюстки троянд, незнайомець мав повну можливість роздивитись красу циганки.– 6. Дізнавшись, що Кармен живе на краю передмістя, її новий знайомий захотів провести її додому.– 7. Кармен і її супутник підійшли до будинку аж ніяк не схожого на палац. Стара, зморщена циганка похожа на відьму, відкрила їм двері і щось пробурмотіла на незнайомій говірці.– 8. Розклавши карти на столі циганка почала ворожити. Її віщування були хмурні.– 9. Балакучість Кармен дратувала Дона-Хосе.– 10. Небажаний гість грубо відштовхнув циганку, яка спішила йому щось сказати і зробив крок до дверей.– 11. Дон-Хосе не вважав що з його боку небудe нескромністю спитати у свого суперника мету його приходу.– 12. Кармен з надзвичайною квапливістю почала розповідати Дон-Хосе про події минулого дня, але він був у поганому настрої і неслухав її.– 13. Він кинув на циганку погляд повний зневаги і не зволив їй відповісти.- 14. Повернувшись додому, він побачив, що його портсигар був порожній і що в нього вкрали годинник.

15.Thème :
Моя циганка не могла претендувати на таку досконалість. Її шкіра, щоправда, напрочуд гладенька, своєю барвою нагадувала мідь. Її очі були розкосі, але з чудовим розрізом; її губи – трохи повнуваті, але гарно окреслені, і за ними видніли зуби, біліші від очищених зерен мигдалю. Її волосся, можливо, трохи грубувате, було чорне, з синім полиском, як воронове крило, довге й лискуче. Щоб не втомлювати вас аж надто детальним описом, скажу, що з кожним недоліком у неї поєднувалась якась принадлива риса, яка, можливо, через контраст вимальовувалась і ще виразніше. Це була дивна і дика краса; це обличчя відразу вражало, і його неможливо було забути. Надто ж її очі мали вирвз водночас і чуттєвий і жорстокий: такого я відтоді не зустрічав у жодному людському зорі. “Циганське око – що вовче око”. Ця іспанська приказка містить влучне спостереження. Якщо вам ніколи відвідати зоопарк, аби придивитись до вовчих очей, погляньте на свого кота, коли він чигає на горобця.

ANALYSE STYLISTIQUE DU TEXTE

L'étude stylistique d'un texte permet de mettre en évidence les moyens mis en œuvre par un auteur, dans un cadre générique déterminé, pour faire partager une vision spécifique du monde (c'est-à-dire ce qui est dit, raconté). L'analyse stylistique d'un texte repose généralement sur l'étude du vocabulaire, des figures de style, de la syntaxe, etc. tout en conciliant la forme et le fond (= le sens). Ce qui fonde l'étude stylistique d'un texte est la conviction que chaque texte littéraire véhicule une vision subjective, c'est-à-dire une vision non neutre.

LA FORME de l’extrait de la nouvelle « Carmen »

Étude du vocabulaire
1. Complétez le champ lexical (groupement de termes exprimant une même idée, c'est-à-dire contenant des sèmes identiques) de la « sorcellerie ». Expliquez cette notion en employant les mots repérés.
Séquence 1. l. 5 vêtue, tout en noir ; l. 37 bohémienne ; l.38 dise la baji ; l. 41 une sorcière ; l. 43 une servante du diable ; l. 46 les sciences occultes ; conjurer l’esprit de ténèbres ; l. 49 les superstitions ; l. 50 la magie.
Séquence 2. l. 2 un globe de verre ; etc.
Séquence 3. l. 13 les cérémonies magiques ; etc.
2. La nouvelle « Carmen » a pour enjeu l’étude ethnographique des mœurs de gitans espagnols. Trouvez dans le texte les réalités et les mots espagnols et gitans, expliquez-les en français. Par exemple :
¨    grisette (f) - Vieilli  Jeune fille de condition modeste, ouvrière dans les maisons de couture, de mœurs faciles et légères.


Étude des figures de style

·      Comparaison
La comparaison met en relation deux termes (le comparé A et le comparant B) grâce à un terme-outil de comparaison (comme, tel, semblable, etc.). Elle rapproche deux mots ou deux expressions selon un rapport de ressemblance ou d’analogie. L’effet créé : la fusion connotative (le comparé A capte beaucoup de connotations[1] du comparant B et vice versa).
Exemple d’analyse d’une comparaison :
Séquence 2 ; l. 16 « des dents plus blanches que des amandes sans leur peau » - le comparé A « dents blanches » est lié au comparant B « amandes sans leur peau » par un outil de comparaison « plus... que ». Effet de style : cette comparaison est faite d’après l’analogie de la couleur. Les connotations qu’apporte le comparant « amandes » sont : fruit, noyau, exotique, forme oblongue, surface lisse, doux, amer, gourmandise, bouche etc.
Exercice. Cherchez les comparaisons dans l’extrait de la nouvelle « Carmen » et expliquez leurs effets de style.
[1] Connotation (f) ou le sens connoté d’un mot, c’est un sens second, affectf (influencé par les sentiments) et suggéré (sous-entendu), variable selon les groupes des individus, le contexte etc. (≠ Dénotation (f) ou le sens dénoté d’un mot, c’est un sens objectif, livré par le dictionnaire, adopté par tous les usagers de la langue.)

·      Litote
La litote est une figure qui consiste à dire moins pour suggérer davantage (un mot ou une expression B remplace un mot ou une expression A où B dit moins que A, l’attenue, le minore).
L’effets créés : la litote renforce l'information, mais aussi exprime la sobriété, la mesure et la pudeur. Elle peut être souvent ironique.
Exemple d’analyse de la litote :
Séquence 4 ; l.4 « une maison qui n’avait nullement apparence d’un palais » (B) ≠ c’était un taudis (A) – l’emploi de la litote souligne la pauvreté de la maison. Effet de style : atténuation d’une idée par une tournure moins forte ; ironie.
Exercice. Expliquez les effets de style des litotes suivantes :
Séquence 1 ; l.18 « je crus n’être point indiscret »; Séquence 4 ; l.4 « d’une façon peu gracieuse ».

·      Antithèse
L’antithèse oppose des mots, des phrases ou des ensembles plus vastes (paragraphes, chapitres) dont le sens est inverse ou il le devient selon le contexte (A ≠ B).
L’effets créés : elle met en parallèle A et B pour mieux les opposer, mettre en évidence, valoriser l’un des éléments ou les deux.
Exemple d’analyse de l’antithèse :
Séquence 2; l.14-15 « ses yeux étaient obliques mais admirablement fendus » - l’écrivain met en parallèle deux caractérisations : yeux obliques (généralement défaut de visage) et yeux admirablement fendus (marque de beauté). Effet créé : opposer pour valoriser un des éléments de l’opposition – la beauté des yeux de la bohémienne.
Exercice. Repérez d’autres antithèses dans l’extrait et expliquez leurs effets de style.

·      Oxymore
Un oxymore est une figure d'opposition qui, à la différence de l'antithèse, fait coexister deux termes de sens contraire à l'intérieur d'un même syntagme[2] (A+B=AB où A ≠ B).
L’effet créé : l’oxymore réunit deux réalités antithétiques pour les rendre identiques.
Exemple d’analyse de l’oxymore :
S.; l. «obscure clarté qui tombe des étoiles » – le syntagme nominal obscure clarté fait coexister deux antonymes (clair ≠ obscur). Effet créé : création de la nouvelle réalité – la lumière était fort faible.
Exercice. Expliquez les effets de style de l’oxymore contextuel suivant : S.2 ; l. 28 «une jolie sorcière ».
[2] Un syntagme est un groupe de mots qui forme une unité par son sens et par sa fonction, à l'intérieur de la phrase.

·      Ironie
L’ironie est une figure macrostructurale qui consiste à affirmer le contraire de ce que l'on veut faire entendre ; elle peut avoir recours à l'antiphrase et l'hyperbole.
L’effets créés : la raillerie, l’implication de la connivence de lecteur.
Exemple d’analyse de l’ironie :
S.; l. «j’avais des soupçons que cette gorge ne soit pas la mienne » – le narrateur veut dire par cette phrase qu’en fait il était sûr qu’il s’agissait de sa propre gorge, car à part lui dans la pièce il n’y avait personne d’autre et la situation indiquait que c’était lui qui aurait pu être exécuté. Effet créé : l’ironie marque l’attitude peu sérieuse aux événements.
Exercice. Cherchez l’ironie dans l’extrait et expliquez son effet de style.

·      Antiphrase
Il s'agit d'un trope qui consiste à sous-entendre le contraire de ce que signifie la phrase énoncée.
L’effet créé : cette figure microstructurale ne peut se comprendre que dans une macrostructure d'ironie.  
Exemple d’analyse de l’antiphrase :
S.; l. «de me voir en si bonne compagnie » - l’écrivain emploie le mot bonne pour dire mauvaise (dangereuse). Effet créé : provoquer et soutenir l’ironie – on dit le contraire de ce que l’on pense.
Exercice. Repérez d’autres antiphrases dans l’extrait et expliquez leurs effets de style.

LE SENS de l’extrait de la nouvelle « Carmen »

1. Résumez l’histoire de l’extrait de la nouvelle « Carmen ».
2. Présentez le personnage de Carmen (du point de vue du narrateur). Personnifie-t-elle la nation bohémienne ?
3. Présentez le personnage du narrateur. Quelles sont les motivations de son aventure ?
4. Présentez le personnage de don José. Quel rôle joue-t-il dans l’intrigue de l’extrait ?
5. Montrez comment le récit représente le thème de la sorcellerie.

TEXTE COMPLÉMENTAIRE

Première rencontre de don José et de Carmen
Je suis né, dit-il, à Elizondo, dans la vallée de Baztan. Je m'appelle don José Lizarrabengoa, et vous connaissez assez l'Espagne, monsieur, pour que mon nom vous dise aussitôt que je suis Basque et vieux chrétien. Si je prends le don, c'est que j'en ai le droit, et si j'étais à Elizondo, je vous montrerais ma généalogie sur un parchemin. On voulait que je fusse d'Eglise, et l'on me fit étudier, mais je ne profitais guère. J'aimais trop à jouer à la paume, c'est ce qui m'a perdu. Quand nous jouons à la paume, nous autres Navarrais, nous oublions tout. Un jour que j'avais gagné, un gars de l'Alava me chercha querelle; nous prîmes nos maquilas, et j'eus encore l'avantage; mais cela m'obligea de quitter le pays. Je rencontrai des dragons, et je m'engageai dans le régiment d'Almanza, cavalerie. Les gens de nos montagnes apprennent vite le métier militaire. Je devins bientôt brigadier, et on me promettait de me faire maréchal des logis, quand, pour mon malheur, on me mit de garde à la manufacture de tabacs à Séville. Si vous êtes allé à Séville, vous aurez vu ce grand bâtiment-là, hors des remparts, près du Guadalquivir. Il me semble en voir encore la porte et le corps de garde auprès. Quand ils sont de service, les Espagnols jouent aux cartes, ou dorment; moi, comme un franc Navarrais, je tâchais toujours de m'occuper. Je faisais une chaîne avec du fil de laiton, pour tenir mon épinglette. Tout d'un coup les camarades disent : Voilà la cloche qui sonne; les filles vont rentrer à l'ouvrage. Vous saurez, monsieur, qu'il y a bien quatre à cinq cents femmes occupées dans la manufacture. Ce sont elles qui roulent les cigares dans une grande salle, où les hommes n'entrent pas sans une permission du Vingt-quatre, parce qu'elles se mettent à leur aise, les jeunes surtout, quand il fait chaud. A l'heure où les ouvrières rentrent, après leur dîner, bien des jeunes gens vont les voir passer, et leur en content de toutes les couleurs. Il y a peu de ces demoiselles qui refusent une mantille de taffetas, et les amateurs, à cette pêche-là, n'ont qu'à se baisser pour prendre le poisson. Pendant que les autres regardaient, moi, je restais sur mon banc, près de la porte. J'étais jeune alors; je pensais toujours au pays, et je ne croyais pas qu'il y eût de jolies filles sans jupes bleues et sans nattes tombant sur les épaules. D'ailleurs, les Andalouses me faisaient peur; je n'étais pas encore fait à leurs manières : toujours à railler, jamais un mot de raison. J'étais donc le nez sur ma chaîne, quand j'entends des bourgeois qui disaient : Voilà la gitanilla ! je levai les yeux, et je la vis. C'était un vendredi, et je ne l'oublierai jamais. Je vis cette Carmen que vous connaissez, chez qui je vous ai rencontré il y a quelques mois.
Elle avait un jupon rouge fort court qui laissait voir des bas de soie blancs avec plus d'un trou, et des souliers mignons de maroquin rouge attachés avec des rubans couleur de feu. Elle écartait sa mantille afin de montrer ses épaules et un gros bouquet de cassie qui sortait de sa chemise. Elle avait encore une fleur de cassie dans le coin de la bouche, et elle s'avançait en se balançant sur ses hanches comme une pouliche du haras de Cordoue. Dans mon pays, une femme en ce costume aurait obligé le monde à se signer. A Séville, chacun lui adressait quelque compliment gaillard sur sa tournure; elle répondait à chacun, faisant les yeux en coulisse, le poing sur la hanche, effrontée comme une vraie bohémienne qu'elle était. D'abord elle ne me plut pas, et je repris mon ouvrage; mais elle, suivant l'usage des femmes et des chats qui ne viennent pas quand on les appelle et qui viennent quand on ne les appelle pas, s'arrêta devant moi et m'adresse la parole :
– Compère, me dit-elle à la façon andalouse, veux-tu me donner ta chaîne pour tenir les clefs de mon coffre-fort?
– C'est pour attacher mon épinglette, lui répondis-je.
– Ton épinglette ! s'écria-t-elle en riant. Ah ! monsieur fait de la dentelle, puisqu'il a besoin d'épingles !
Tout le monde qui était là se mit à rire, et moi je me sentais rougir, et je ne pouvais trouver rien à lui répondre.
– Allons, mon cœur, reprit-elle, fais-moi sept aunes de dentelle noire pour une mantille, épinglier de mon âme !
Et prenant la fleur de cassie qu'elle avait à la bouche, elle me la lança, d'un mouvement du pouce, juste entre les deux yeux. Monsieur, cela me fit l'effet d'une balle qui m'arrivait... Je ne savais où me fourrer, je demeurais immobile comme une planche. Quand elle fut entrée dans la manufacture, je vis la fleur de cassie qui était tombée à terre entre mes pieds; je ne sais ce qui me prit, mais je la ramassai sans que nies camarades s'en aperçussent et je la mis précieusement dans ma veste. Première sottise !
·               Comparez les descriptions de Carmen de deux points de vue : celui du narrateur et celui de don José.

Bilan

PORTRAIT D’UNE BOHÉMIENNE
Le portrait est un texte donnant des renseignements sur l'être d'un personnage, réel ou fictif. Il peut prendre la forme de la prose, du dialogue, du monologue, du récit d'actions, de la description d'un habitat ou d'un décor, etc. Le personnage est construit par toutes les phrases prononcées sur lui et par lui. L'on pourrait alors définir le portrait comme un lieu du texte ou comme un texte caractérisé par une densité telle de renseignements que le lecteur peut se faire une idée complète d'un personnage.
Dans le portrait romanesque réaliste l'information est différée. Le détail est un indice, indice valant pour les événements ultérieurs du récit, ou indice rappelant un événement antécédent. Au lieu de parler directement de la psychologie du personnage, de son caractère ou de sa profession, on parle de son habit, de son habitat, de ses habitudes. Le portrait peut être remplacé par une description du milieu.
Le mythe de la bohémienne
Carmen et Esméralda, deux figures emblématiques de la bohémienne dans la littérature française du XIXe siècle. L'une et l'autre allient l'attrait de l'exotisme, le pouvoir de la magicienne, la force de la séduction. Mais, à la différence de Hugo, qui semble vouloir effacer cette étrangeté en faisant d'Esméralda une enfant enlevée, Mérimée crée avec Carmen le mythe de la bohémienne, obéissant à la seule "loi d'Égypte", qui exige la soumission absolue à l'intérêt de la tribu, et prisant, par dessus tout, la liberté de mouvement. De Mila dans La Chronique du règne de Charles IX à la jeune fille dans Djoûmane, Carmen a de nombreuses sœurs dans l'œuvre de Mérimée. Aucune ne possède cependant autant de relief qu'elle. Aussi inspira-t-elle l'opéra de Bizet, qui fait oublier parfois l'originale.
La rencontre de la bohémienne correspond à une plongée dans l'inconnu, en raison de l'attitude de Carmen, d'abord (tous ses actes sortent de l'ordinaire : elle chante, danse, lit les lignes de la main, sait guérir les blessures, se livre à la contrebande et au vol), et, plus profondément, en raison de l'incertitude de son origine qui fait d'elle, partout, une étrangère. On peut voir en Carmen une figure de la transgression, non seulement parce que sa beauté échappe aux codes, mais parce que sa nature insituable et mêlée ébranle les frontières entre humanité et animalité et rend caduques les lois sociales.
Carmen incarne en priorité deux valeurs : elle est d'abord une grande figure de femme fatale et un symbole de liberté. L'amour, ambigu, dévastateur, qu'elle porte à don José se laisse comparer à celui d'Iseult, mieux, à celui de Manon Lescaut. La fleur de cassie qu'elle jette au front de don José remplace la flèche ou le philtre de l'amour ; elle s'attache son amant de manière définitive. Elle croit au destin (confondu pour elle avec Mère nature) : tout est écrit d'avance, on ne peut lutter ni contre l'amour, ni contre la mort. Mais au dessus de l'amour, Carmen place la liberté, celle des nomades, qu'elle défend coûte que coûte : "Pour les gens de sa race, écrit le narrateur, la liberté est tout, et ils mettraient le feu à une ville pour s'épargner un jour de prison".


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