Manuel DALF (+corrigé)

Dranenko G., Français, niveau avancé DALF, Kyïv, Peroun, 2004, 232 p. 

DOSSIER 2.   “Vie des jeunes”
DOCUMENT 5.
GÉNÉRATION KANGOUROU:
20 - 30 ans et toujours chez leurs parents

Études à rallonge, parents copains, précarité et chômage... pourquoi sont-ils si nombreux à rester lovés dans le nid familial ? L’Express a poussé les portes

On trouve encore souvent sur leurs étagères une peluche adorée ou une vieille maquette. Aux murs sont punaisés les posters de leurs années lycée. Ils dorment dans leur lit d’enfant, mais ils n’ont plus 20 ans, parfois depuis longtemps. Génération kangourou. Au chaud chez papa-maman, à l’âge où Rimbaud avait achevé son œuvre... Selon une enquête de l’institut Louis Harris (novembre 1997), un jeune sur deux entre 21 et 24 ans, un sur cinq entre 25 et 29 ans reste toujours scotché chez ses parents.
En l’espace d’une génération, le calendrier d’entrée dans la vie adulte a été totalement bouleversé. Dans les années 60 et 70, ceux qui sont aujourd’hui parents quittaient leur famille très tôt pour conquérir sa liberté. Et très vite on décrochait son premier job. “La contestation est le privilège d’une société qui se porte bien. Aujourd’hui, si on claque la porte, on risque de le payer toute sa vie”, affirme Emmanuel, 25 ans, en DEA d’économie. Les “grands enfants” des soixante-huitards jouent donc désormais les prolongations. Ils accumulent les diplômes, collectionnent les jobs sans lendemain, les amours à l’essai, et restent sous le toit familial. Si confortable quand il fait froid dehors.
Des mineurs au long cours
“C’est un changement socio-démographique majeur”, analyse Nicolas Herpin, sociologue à l’Insee. Une nouvelle classe d’âge est née, celle des “post-adolescents”, ainsi que les baptise le psychanalyste Tony Anatrella. Physiquement adultes depuis longtemps, ils flirtent et draguent depuis leurs 14 ans. Ils ont souvent ordinateur et téléphone portable, bénéficient d’une large liberté, mais, mineurs au long cours, ils sont tenus radicalement en marge de l’activité économique. “Dès qu’on réussit en classe, on vous incite à faire des études longues. On n’a pas vraiment le choix”, regrette Hervé, 25 ans, en DESS d’automatique, qui aurait préféré prendre son indépendance dès 18 ans, “un âge où l’on est toujours à fait prêt à s’assumer”, affirme-t-il..
Las! Depuis les années 70, l’âge moyen de fin d’études a progressé de cinq ans. Les parcours scolaires n’en finissent plus de zigzaguer. Luc, peu motivé par son BTS, s’inscrit, lui, en néerlandais à la fac, puis se lance dans une licence d’échanges culturels, après avoir tenté en vain de se spécialiser dans le multimédia. “C’est la génération Passe ton DEA d’abord!” ironise le sociologue Bernard Préel, directeur adjoint de la société d’études Bipe Conseil. La plupart des parents sont largués dans le labyrinthe éducatif. Mais ils sont prêts à tout pour soutenir leur progéniture. Car, sans diplôme — ils le savent bien — ce sera la galère assurée.
De fait, les emplois stables à temps complet sont devenus une denrée rare pour les débutants. En 1991, un sur deux en décrochait un au sortir de l’école. En 1995, ils ne sont plus qu’un tiers à se casser aussi facilement. Et les heureux élus sont souvent payés au lance-pierre. En 1984, le niveau de vie moyen des moins de 30 ans était de 20 % inférieur à celui des quinquagénaires. Aujourd’hui, l’écart s’est fortement creusé. En moyenne, les jeunes gagnent moitié moins que leurs parents.[...]
A “l’hôtel” familial
Mais l’allongement des études et la précarité économique ne suffisent pas à expliquer cette cohabitation prolongée des jeunes et de leurs parents. “Ils restent parce que la famille s’est complètement transformée depuis vingt ans. Il y a eu une totale libération des mœurs”, analyse le sociologue Olivier Galland. La génération 68 s’était affirmée en s’opposant à l’ordre établi, en  jetant aux orties les principes de ses parents, décidément vieux jeu. Aujourd’hui, installée dans la vie, pourvue d’emplois rémunérateurs, elle abrite ses propres enfants sans interdits moraux, petit ami à demeure si nécessaire, en toute permissivité.
Des parents copains qui paient sans juger, qui protègent sans brider, pourquoi les quitter ? “C’est pratique. On mange bien. On n’est pas seul. Il n’y pas de factures. Avoir pu rester aussi longtemps, pour moi, c’est une chance”, reconnait Céline, 28 ans, cadre commercial depuis huit mois, qui, grâce à l’hôtel familial, a pu se payer deux séjours longue durée à New York et Jérusalem.
Jouir du moment présent
La plupart des 20-30 ans, comme elle, s’offrent le superflu à coups de petits boulots: sorties, fringues, cigarettes, musique, voyages... “Si elle n’imagine plus son futur, cette jeunesse entend au moins jouir du moment présent”, note Bernard Préel.
Car, si on a parfois l’impression que les jeunes s’incrustent, pères et mères, le plus souvent, ne font rien pour les pousser dehors. Au contraire. ”Le jour où je partirai, mes parents seront tristes. On met de la vie, de l’animation dans la maison”, dit Nathalie. Garder longtemps les enfants à la maison, n’est-ce pas aussi pour les parents une manière de retenir leur jeunesse ? De lutter contre le temps qui file ? Bref, une forme d’égoïsme pour une génération de quinquagénaires qui n’a jamais connu la dureté du monde: ni guerre ni crise économique ne l’ont affecté.
Un monde complexe
Au-delà de cet éclairage générationnel, il y a la réalité de l’époque. Les conditions de vie. Pourquoi partir quand tout vous retient ? “Les cohabitations de longue durée permettent aux jeunes de trouver peu à peu leur voie dans un monde de plus en plus complexe. En les hébergeant, les parents leurs offrent la possibilité de tracer lentement leur chemin personnel, en tâtonnant, en expérimentant”, analyse Pierre Martinot Lagarde.
Cette situation nouvelle dans la relation enfant-parent est, sans doute, d’abord une contrainte — l’effet d’une réalité économique et sociale nouvelle. D’après le sondage Louis Harris, s’ils avaient le choix — entendons les moyens de leur indépendance — neuf jeunes sur dix quitteraient tout de suite le foyer familial...
Agnès Baumier et Marie-Laure de Léotard   
L’Express 8/1/98

EXERCICES DE LEXIQUE

1. D’après le contexte, expliquez les expressions:
·rester scotché chez ses parents
·décrocher son premier job
·claquer la porte
·être payé au lance-pierre
·la précarité économique
·jeter aux orties
2. Que désignent les sigles DEA, DESS, BTS ?
3. Trouvez dans le texte les mots et les expressions qui reprennent le terme “génération kangourou  P.ex. Þ les “post-adolescents” - les mineurs au long cours - les “grands enfants” des soixante-huitards ....
4. Les mots draguer, la galère, se casser, les fringues appartiennent au registre familier de  langue. Trouvez-en d’autres dans le texte et donnez des synonymes au registre courant.
 5.  Retrouvez dans le texte le champ sémantique du mot “LONG”.


COMPRÉHENSION

1. Quel phénomène social a inspiré le thème de cet article ? Comment est-il représenté dans les indices extérieurs du texte ? 
2. Que veut dire l’expression “l’hôtel  familial”?  Pourquoi l’auteur l’emploie-t-il ?
3. Notez le numéro du paragraphe consacré à chaque cause qui explique cette situation:
·     études à rallonge
·     libération des mœurs
·     chômage, précarité
4. Quelle est l’attitude des parents envers la cohabitation prolongée? et les jeunes ?
5. D’après le texte, dites qui sont les soixante-huitards (ou la génération 68) ? En quoi sont-ils différents des jeunes d’aujourd’hui? Pourquoi ?

DE LA COMPRÉHENSION A L’EXPRESSION

1. Les jeunes Ukrainiens quittent-ils tôt leurs parents? Peut-on parler de la “génération kangourou” en Ukraine?
2. Citez les avantages et les inconvénients de la cohabitation prolongée pour les jeunes  en Ukraine.
3.Quels problèmes dans les relations parents-enfants apparaissent quand les jeunes restent longtemps chez leurs parents ?
fiche culture

RELATIONS PARENTS-ENFANTS

Les indicateurs concernant la famille sont en rouge...
Statistiquement, la famille ne ressemble plus guère au modèle traditionnel. Le nombre de mariages a diminué de plus d’un tiers depuis 1975, au profit de l’union libre ou du célibat. Dans le même temps, le nombre de divorces a doublé. La natalité a atteint en 1993 le niveau le plus bas du siècle en temps de paix. Les familles monoparentales et complexes se sont multipliées.

... mais la famille reste la valeur essentielle.
Malgré la mutation qui s’est produite au cours des dernières décennies, la famille reste une valeur sure pour les Français de tout âge. Elle est le lieu où s’effectue la transmission de la vie. Elle est celui de l’amour et de la tendresse, au sein du couple comme entre les parents et les enfants. Elle est aussi le centre de la solidarité entre les générations. Dans une société sans repères, elle est le creuset où se transmettent les valeurs et où se forgent celles de l’avenir. C’est pourquoi la famille n’est pas menacée, mais plébiscitée par les Français. Mais elle est aussi vécue et pensée différemment.
 CORRIGé
LEXIQUE
Fiche vocabulaire 1.5.
Mot,
expression
Traduction
Explication
Synonymes
Exemples d’emploi
Remarques
rallonge
n. m.
вставка, додаток
Ce qu'on ajoute à une chose pour la rallonger.
allonge
Table à rallonges (розсувний стіл).

se lover
згортатися в клубок
S'enrouler sur soi-même.

Se lover sur un divan, s'y pelotonner.

punaiser
приколоти кнопками
Fixer avec des punaises.

Punaiser des cartes postales au mur.

scotcher
приліплювати
Anglic. Coller avec du ruban adhésif.

Rester scotché chez ses parents : ne pas partir, vivre toujours avec
décrocher
дістати, ухопити
 Fig. et fam. Obtenir.

Décrocher son premier job : obtenir son premier emploi.
contestation n. f.
спір, заперечення
Vive opposition.
dispute, querelle
Entrer en contestation avec qqn

claquer la porte
гримнути дверима
Partir en manifestant la rupture.



draguer
загравати з
Fam. Faire la cour à qqn.

Il commence à draguer ma femme.

en marge de
поза чимсь, за бортом
Еn dehors de, mais qui se rapporte à.

Vivre en marge: sans se mêler à la société ou sans y être accepté.

s’assumer
бути в згоді з самим собою, відповідати за себе
S'accepter, se prendre en charge.

« Nous ne sommes nous qu'aux yeux des autres, et c'est à partir du regard des autres que nous nous assumons comme nous » (Sartre).

licence n. f.
Mod. Grade de l'enseignement supérieur français, première année du deuxième cycle.
diplôme
Licence en droit, licence ès lettres. Licence d'anglais.
Terminer, obtenir sa licence.
Voir DALf p. 97
être largué 
перестати розумітися на чомусь
Ne pas parvenir à suivre, ne plus comprendre.

Dès le troisième cours, j'ai été largué.

progéniture
n. f.
потомство (про дітей)
Plaisant. La famille, les enfants.
Promener sa progéniture.

galère n. f.
безвихідь, глухий кут
Fig. et fam. Travail pénible, situation difficile.

Quelle galère!
galérer : Vivre de travaux épisodiques et peu rémunérateurs.
denrée n. f. rare
раритет, дефіцит
Fig. Une chose, une qualité précieuse qui se rencontre rarement.
rareté


se caser
пристроїтися
- Fam. Se placer.
- Fig. Se marier.

J'ai pu me caser au dernier rang. Il cherche à se caser.

avec un lance-pierre
небагацько
Loc. fam. insuffisamment.
Etre payé au lance-pierre : toucher une somme médiocre.
quinquagénaire n. m, f.
п’ятидесятилітній
Qui a entre cinquante et cinquante-neuf ans.



précarité
n. f.
нетривкість, ненадійність
 Littér. Caractère ou état de ce qui est précaire.
fragilité, instabilité
La précarité économique : l’absence d’un emploi stable et bien payé.

Jeter aux orties
відкидати, відмітати,
не визнавати
Abandonner, rejeter comme encombrant ou inutile.


ortie n.f. - кропива
vieux jeu
n. m.
допотопний, віджилий
Рeu en accord avec la mode, le goût du jour.
démodé
Elle est, elles sont vieux jeu. C'est vieux jeu.

rémunateur (adj.)
добре оплачуваний
Qui paie bien, procure des bénéfices.
lucratif,
fam. juteux
Activité rémunératrice.

brider
зв’язувати, стримувати
Littér. Contenir dans son action, gêner dans son développement (un sentiment, etc.).
freiner, réprimer

Contr. libérer
fringues n. f., pl.
манаття
Fam. Vêtements.
frusques
S'acheter des fringues.

s’incruster chez qqn
приживатися, вкорінюватися
Ne plus en déloger.
s'enraciner
Cela fait trois heures qu'il est là, il s'incruste!


Se faire une idée Net


EXERCICES

1. Reformulationvoir Fiche vocabulaire.

2. Abréviations → voir Glossaire.
voir la tion
3. Reprises :
génération kangourou  = les “post-adolescents” = les mineurs au long cours = les “grands enfants” des soixante-huitards = les 20-30 ans = les jeunes = adultes depuis longtemps = la génération  « Passe ton DEA d’abord !» = la progéniture = les moins de 30 ans = cette jeunesse

4. Registre familiervoir Fiche vocabulaire.

5.  LONG : long,  prolongations, prolongée, rallonge, longtemps, longue

¨COMPREHENSION

Question 1. Thème : « L’accroissement de la cohabitation prolongée de grands enfants avec leurs parents ».
Titre :
Génération kangourou - allusion à la femelle du kangourou qui abrite ses petits dans sa poche ventrale.
20 – 30 ans et toujours chez leurs parents - enfants adultes
Sous-titre :
Études à rallonge, parents copains, précarité et chômage... pourquoi sont-ils si nombreux à rester lovés dans le nid familial ?

Question  2.
Hôtel familial = hôtel (établissement où on loge et où l'on trouve toutes les commodités du service) + famille (personnes apparentées vivant sous le même toit)

Question  3.
·     études à rallonge - § 4 (Las! Depuis les années 70...)
·     libération des mœurs - § 6 (Mais l’allongement des études...)
·     chômage, précarité  - § 10 (La plupart des 20-30 ans...)

Question  4.
Parents : Ils acceptent cette situation bon gré mal gré, la justifient avec la présence des jeunes à la maison qui rend la vie plus animée (« une forme d’égoïsme pour une génération de quinquagénaires qui n’a jamais connu la dureté du monde ») etc. Mais en général ils « ne font rien pour les pousser dehors ».
Jeunes : Pour eux c’est pratique (“On mange bien. On n’est pas seul. Il n’y pas de factures... »), parfois ils abusent même de cette situation (« s’offrent le superflu... »). Mais « s’ils avaient le choix — entendons les moyens de leur indépendance — neuf jeunes sur dix quitteraient tout de suite le foyer familial... »

Question  5.
Soixante-huitards : « Dans les années 60 et 70, ceux qui sont aujourd’hui parents quittaient leur famille très tôt pour conquérir sa liberté. Et très vite on décrochait son premier job. »
« La génération 68 s’était affirmée en s’opposant à l’ordre établi, en  jetant aux orties les principes de ses parents ».
Génération contemporaine : « Les “grands enfants” des soixante-huitards jouent donc désormais les prolongations. Ils accumulent les diplômes, collectionnent les jobs sans lendemain, les amours à l’essai, et restent sous le toit familial. »

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